Happés par la nuit
Battante usée par quarante ans de labeur
Hélas pour moi qui te guette, la nuit t’a avalée,
Maintenant qu’émergent les mots que j’aurais voulu poser, là,
dans le souci de toi, pour que tu les attrapes comme la crasse
Qui jonchait le sol avant que tu ne le lessives.
Mots, posés par-dessus le crissement de la béquille grippée,
Par dessus la complainte de la grille à rouleau qui,
Péniblement se déploie, marquant la fin de ta nuit de labeur.
Toi ! Aux membres engourdis à force de flexions
Au milieu de la nuit, tu peines à te hisser par-dessus la fourche,
Alors tu pousses, tu le pousses le vélo
Et tu t’éloignes, dans le silence de ceux qui lavent le monde
De nos abandons, de notre mépris, de notre ils-sont-là-pour-çà.
Là où tu te rends, auras-tu seulement une présence ?
Je voudrais seulement être là, je voudrais seulement
Avec toi être happé par la nuit, te dire que quelqu’un t’attend.
Je te suis reconnaissant de me rendre la nuit moins solitaire